La tentation de l'Ailleurs En acceptant la proposition de Roland Hayrabedian d'écrire pour Musicatreize une pièce vocale, je perdais mes repères, en effet tout mon catalogue se décline dans le monde instrumental et la voix est (était !) pour moi une sorte de frontière inquiétante et infranchissable. Face à cette perte de repère, j'ai voulu dans une certaine mesure remettre à plat un langage musical (le mien !), me laisser tenter par cette porte vers la découverte, par un ailleurs musical.J'ai donc puisé les sources (le matériau musical) de cette première pièce vocale dans le Shômyô, chants liturgiques bouddhistes, tel qu'il est pratiqué par les sectes Shingon et Tendai au Japon. La forme cyclique du Shômyô (forme symptomatique dans la culture Japonaise) n'est pas sans rappeler celle des chants grégoriens (et me voilà de nouveau en terrain connu), alternance parfois antiphonique de récitations de textes canoniques et de chants contemplatifs. Quant au matériau vocal, le 'texte', j'ai pratiqué un jeu combinatoire de l'alphabet japonais Katakana pour créer des groupes de syllabes dans le seul objectif d'une recherche de timbre et non de sens.Bien évidemment, je ne cherche pas dans 'la voix claire' à faire sonner la pièce comme un rituel par imitation, mais plutôt à rester totalement perméable à une culture musicale très éloignée de la mienne, comme une sorte de révélateur d'idées musicales. J'ai voulu conserver deux éléments directement issus de la tradition du Shômyô - l'utilisation par les chanteurs de petits instruments à percussions (cymbales petites cloches, pièces de bois, plaques de tôle...) et l'adaptation à une écriture occidentale (si cela est possible !) d'un style vocal particulièrement présent dans le Shômyô: le chant diphonique (ou biformantique). Le terme Shômyô est issu du sanscrit 'sabdavidja' (la voix claire) .Jean-Louis Agobet / Choeur (12 SATB)