Dans les archives personnelles de Francis Ponge, on trouve des cahiers de travail, reprenant tout ou partie des poèmes à venir - esquisses, brouillons, extraits de ce qui sera ensuite publié dans ses recueils. Le cahier bois de rose est l'un d'eux - c'est en regard de ces archives mystérieuses pour moi que j'ai ainsi nommé mon cycle d'oeuvres de musique de chambre, s'étalant sur une période de cinq années.Chacune des pièces de ce cycle est construite de la même façon - sont interprétées toutes les esquisses, tentatives de mise en forme, réflexions diverses que j'ai pu noter au fil des mois - et le sujet de chaque oeuvre est un objet concret : ici une étoffe, là une allumette ou une pomme de terre. Je l'écoute, je le regarde, je le note, je l'analyse, j'en appréhende les contours réels, philosophiques et poétiques.La fébrilité musicale des objets que j'ai choisis de subjectiver est telle que la musique flirte souvent avec le silence et le bruit. La forme faite d'esquisses successives nous invite à prendre chaque moment comme s'il fallait s'y arrêter. C'est donc la présence scénique des interprètes, leur manière de donner corps à la forme comme à l'objet qui devient la clé de voûte de l'édifice. La clarté du geste, les déplacements, les respirations font la structure de l'oeuvre.Une pièce a son histoire propre découlant de l'aventure qu'a représentée la composition. J'avais attaqué mon travail autour de l'allumette par une pièce pour contrebasse et orchestre - ma question initiale était alors : qu'est-ce qui ressemble le plus (et le moins) à un son blanc d'orchestre le feu que pourrait faire une allumette. Erotique de l'allumette est la réécriture, la critique, le dépliement, le rebond, une péroraison autour de cette pièce initiale.Colin Roche (septembre 2009) / Contrebasse